Un phénomène proportionnel au développement du web
L’explosion du web vers le milieu des années nonantes a vu également apparaître l’envoi de courriers électroniques non sollicités. Le premier échange d’informations concernant le phénomène de « spamming » date de 1994 et représentait une publicité relative à une loterie de « green cards », les permis d’immigration nord-américains. Depuis cette date et en moins d’une dizaine d’années, cette nouvelle forme de pollution publicitaire représente le quart du volume mondial de courriels. Selon le cabinet d’études Gartner, chaque internaute recevra en moyenne durant l’année 2002 quelque 700 « pourriels ». Pour la petite histoire, les amateurs de cinéma et d’anecdotes informatiques seront certainement enchantés de savoir que le terme de « spam » trouve son origine dans une marque de viande en boîte (Spiced Porc and Ham) fabriquée par la société Hormel Foods. Ce terme a été utilisé pour la première fois dans son sens actuel dans un sketch cinématographique de la seconde série du Monty Python's Flying Circus".
Pourquoi le « spam »est-il négatif ?
Lorsqu’un fournisseur de produits ou de services désire promouvoir un article, il investit de l’argent dans cette opération afin que le destinataire n’ait pas bourse à délier. Ce phénomène paraît normal dans la mesure où il semble logique que les frais d’une telle action soient supportés par la partie espérant gagner un profit en cas de vente de cet article. Lors d’une opération de « spamming », le phénomène inverse se produit puisque les principaux coûts d’acheminement du message publicitaire sont supportés par le destinataire et non pas par le fournisseur. Ce faisant, on comprend aisément que ce mode de communication publicitaire soit particulièrement impopulaire aux yeux des victimes internautes obligées de payer pour consommer de la publicité non demandée.
Une base législative encore obscure
Si tout le monde s’accorde à penser que le « spamming » est un phénomène néfaste pour l’internaute, la jurisprudence helvétique n’est pas encore très claire sur le sujet. Au mois de novembre 2000, la Commission suisse pour la loyauté déclarait le « pourriel» agressif et déloyal et déconseillait son utilisation aux entreprises domiciliées en Suisse. L’envoi de courriers non sollicités contrevient à diverses normes juridiques, comme la loi sur la protection des données et le droit sur la loyauté. La concurrence déloyale est punissable en Suisse et peut entraîner une peine de prison ou une amende pouvant atteindre CHF 100'000.-. Tout internaute ayant reçu de tels messages peut se fonder sur la loi sur la protection des données pour demander à l’auteur du « pourriel » des informations détaillées sur l’étendue et l’origine des données en sa possession mais également obliger ce dernier à supprimer l’intégralité de ces données. Au mois de janvier dernier, la Commission suisse pour la loyauté a instamment demandé à une maison zurichoise de vente par correspondance de mettre fin à une campagne publicitaire agressive envoyée hebdomadairement par courrier électronique à des centaines de milliers d’adresses. Malheureusement, ces réactions à forte connotation médiatique ne représentent qu’une goutte d’eau pure dans un océan déjà très pollué.
Les publicitaires ont inventé une alternative au « spamming »
L’encombrement prodigieux du marché, le changement de mode de vie et le développement des nouvelles technologies de communication ont bouleversé les conceptions fondamentales de la publicité et du marketing. Afin de rester en phase avec le marché, le ressortissant nord-américain Seth Godin a développé le concept de « permission marketing » ou marketing de permission qui propose aux clients de ne recevoir que de l’information qu’ils ont préalablement accepté d’étudier et de transformer un prospect en un client fidèle, de créer avec lui des relations à long terme et de lui envoyer des messages personnalisés pertinents. La montée en puissance de l’utilisation d’Internet et de la téléphonie mobile ont considérablement augmenté l’efficacité du marketing de permission durant ces dernières années – même si l’utilisation commerciale d’Internet est toujours soumise à de nombreuses critiques. Le concept développé par Godin n’est pas vraiment nouveau puisque certaines entreprises utilisent cette méthode depuis de nombreuses années – bien avant l’avènement du réseau des réseaux.
Comment se prémunir contre l’envoi de « pourriels »?
Si le remède miracle n’existe pas et n’existera vraisemblablement jamais, l’application d’un certain nombre de règles permet de s’éviter bien des désagréments. Tout d’abord, il faut absolument éviter de répondre au « spammeur ». En réagissant à ce courrier, vous confirmerez ainsi que votre adresse est actuelle et inciterez ce dernier à revendre vos coordonnées aux amateurs, ce qui aura pour conséquence d’encombrer un peu plus votre boîte aux lettres. Pour éviter cela, il faudra donc supprimer ces messages. L’utilisation d’une deuxième adresse e-mail dite publique vous permettra de surfer sur la toile et de participer à des forums de discussion sans pour autant dévoiler votre adresse personnelle. Si vous utilisez un service de messagerie gratuit, vous pouvez également utiliser des outils de filtrage qui vous permettront d’acheminer directement les spams dans votre poubelle ou dans un dossier spécifique. Cerise sur le gâteau, différents logiciels spécifiques gratuits ou peu onéreux se chargent de filtrer les courriels indésirables.
Liste non exhaustive d’URLs proposant ce type de logiciels :
www.mailgate.com
www.spamkiller.com
www.hms.com
www.spammotel.com
http://biosolutions.hypermart.net
http://travel.to/louieorbeta
L’éradication du spamming reste une utopie
Si l’on peut espérer que l’évolution technologique alliée aux diverses actions juridiques, politiques et économiques visant à éradiquer l’envoi de messages non sollicités rencontre un certain succès dans les temps à venir, ce fléau ne sera jamais complètement rayé de la surface du cybermonde, car, à l’image du monde réel, le monde virtuel reflète bon nombre d’utilisations déviant du droit chemin. Si l’on veut réellement supprimer toute forme de cyberdéviance il faudrait alors supprimer le réseau des réseaux ou pis encore ses utilisateurs et la guérison serait pire que le remède. Raison pour laquelle le « spamming » risque bien malheureusement de hanter encore longtemps l’esprit des internautes que nous sommes.